Chère Nouvelle Vegane

Translation by Christophe Hendrickx. See more French translations of critical vegan essays by grassroots activists by visiting his blog, La Pilule Rouge. The original English version of this essay can be found by clicking here.

TRIGGER WARNING: Sexisme et violence sexuelle

Two young thin white PETA volunteers pose naked on a street corner with their bodies marked like meat cuts holding a PETA sign that asks viewers to go vegan
Chère Nouvelle Végane,

Prépare-toi, car un parcours mouvementé t’attend. Devenir vegane est, au début, une expérience très frustrante et traumatisante. Tu devras apprendre à manger autrement, ce que tu peux acheter ou non, comment gérer tes amis et ta famille, et comment gérer les sentiments intenses de colère et de tristesse qui viennent lorsque l’on ouvre son esprit et son cœur à la souffrance des autres. Rien de tout cela ne sera facile, mais, je te prie de ne pas abandonner, car cela deviendra vraiment plus facile au fur et à mesure de ton parcours. Cela deviendra normal et habituel avant que tu ne le réalises, je le promets.

Tu te tourneras probablement vers la communauté vegane pour t’aider lors de cette transition. Tu te feras beaucoup d’amis formidables et tu apprendras beaucoup des autres. Tu ressentiras un grand sentiment de paix en sachant que tu n’es pas seule et qu’il existe d’autres personnes qui sont aussi passionnées que toi pour changer le monde.

Par la suite, cependant, tu pourrais commencer à réaliser qu’être vegane est une chose, mais qu’être vegane et s’identifier1 comme une femme est tout autre chose. Si tu es en couple, tu pourrais t’apercevoir que ton/ta partenaire est hostile par rapport à ton choix. Surtout si ton partenaire s’identifie comme un homme, ta présence vegane pourrait présenter une remise en question de son autorité masculine. Il pourrait insister sur le fait que tu ne pourras jamais le changer (même si tu n’as jamais mentionné quoi que ce soit à ce sujet !). Il pourrait insister à ce que tu prépares des plats non-vegans, ou que tu l’accompagnes dans des restaurants non-vegans. En tant que femme, tu pourrais ressentir une pression importante à concéder cela. On apprend très tôt aux femmes que les intérêts des hommes passent en premier. C’est nul, mais c’est comme ça. Ne te sens pas mal si c’est le cas.

Woman looking outraged as her male partner scoffs down a burger

Si tu t’identifies en tant que femme, tu pourrais réaliser que tes amis s’identifiant comme des hommes sont également rebutés par ton véganisme. Par exemple, un post Facebook bien intentionné qui rappelle à tes lecteurs que les animaux non-humains comptent aussi, pourrait ennuyer des hommes qui sont prompts à répondre par des commentaires te décrivant comme quelqu’un de a) trop sentimentale ; b) grande gueule ; ou c) « folle ». La sensiblerie, le franc-parler, et la maladie mentale sont toutes des caractéristiques hautement sexuées. Les femmes sont vite rejetées comme étant soit trop féminines, soit pas assez féminines. Pendant des siècles, nous les femmes avons été stéréotypées comme étant « hystériques » et de là institutionnalisées pour nous contrôler et nous faire taire. Tu te trouveras souvent entre le marteau et l’enclume : ne sois pas trop sentimentale, mais, en même temps, surveille ton ton et ne sois pas trop agressive. Tu réaliseras qu’il est quasiment impossible de leur faire plaisir, et je suggère que tu continues simplement à continuer ce que tu faisais.

Male-identified vegan leader gives talk with microphoneMais tes combats en tant que femme végane pourraient ne pas s’arrêter là. Si tu décides qu’être vegane n’est pas assez et que tu veux t’impliquer dans l’activisme, tu feras à nouveau face à plus de violence masculine. L’activisme vegan est dominé par les femmes en termes de nombres, donc tu pourrais t’imaginer que c’est un espace sûr pour toi. De nombreuses manières, ça l’est. Tu trouveras de la solidarité féminine. En revanche, le mouvement vegan est fortement contrôlé par les hommes. Les hommes mènent l’activisme vegan – ils créent la théorie et ils définissent les tactiques qui sont acceptables. Ils occupent majoritairement la scène et leur voix sont les plus fortes.

Ce que cela veut dire c’est que tu ressentiras beaucoup de pression pour aider les autres animaux en ayant un rôle discret en coulisses en soutien de ces hommes. Tu pourrais aussi être encouragée à enlever tes vêtements pour certaines campagnes. Ce ne seront peut-être pas directement les hommes qui te diront de les enlever (les femmes t’encourageront aussi), mais les normes patriarcales du mouvement ont créé un environnement dans lequel on attend tout simplement des femmes qu’elles deviennent des objets sexuels « pour les animaux ». Tu pourrais commencer à penser que se déshabiller pour la cause est « libérateur ». Si tu commences à penser cela, wow, stop. Détrompe-toi. Songe également au fait que seules les femmes minces, blanches, cis sont autorisées à « s’émanciper » pour les autres animaux, et que réveiller les hommes sexuellement n’est pas réveiller les hommes sur le véganisme. Les recherches empiriques indiquent que faciliter l’oppression des femmes ne remet pas en cause l’oppression d’autres animaux.

Tu trouveras également beaucoup d’harcèlement et de violence sexuelle envers les femmes dans le mouvement vegan. Je ne veux pas te faire peur, mais c’est la vérité, et tu devrais être prévenue. C’est quelque chose dont on parle peu, mais c’est plutôt monnaie courante. Si tu es une femme, ne laisse pas cela te dissuader : rappelle-toi simplement que l’engagement pour la justice sociale pour les animaux non-humains ne se traduit pas nécessairement en un engagement pour la justice sociale pour tous. Vraiment, ces hommes qui insistent sur le fait qu’ils se soucient des droits et du bien-être des femmes, des personnes de couleur, et autres groupes humains désavantagés tendent à être tout aussi dangereux que ceux qui ne prennent pas la peine de s’en soucier. Si tu t’identifies comme un homme, je t’implore de travailler pour rendre les espaces militants plus sûrs.

Malheureusement, le travail du changement du monde est le travail des hommes. Si tu t’identifies comme femme, il est probable que tu rencontres de la résistance si tu souhaites participer à la sensibilisation au véganisme de façon plus significative qu’en faisant le café ou en te déshabillant. Cela ne doit pas se passer comme ça. Essaye de ne pas te perdre. Reste forte, prend la parole, et demande à être respectée. Insiste pour que le véganisme soit une expérience positive et ferme. Ne laisse pas les mentalités oppressives de certains t’empêcher de faire le travail important que tu avais prévu. Et messieurs, soyez s’il-vous-plaît solidaires des femmes. Un peu d’aide ne ferait pas de mal.

P.S. Si tu es une femme de couleur, c’est un ensemble supplémentaire de défis. En tant que femme blanche, je ne peux pas parler en profondeur de ces défis, mais je peux te dire que le mouvement vegan peut être un endroit vraiment désagréable par moments. Jette absolument un oeil au Projet Sistah Vegan!

– Corey Lee Wrenn, M.S., A.B.D. Ph.D.

Notes:

1. Cet article parle de l’expérience féminine, qui peut inclure celle des femmes trans, femmes intersexuées, et femmes gender-queers. Il faut prendre en compte le fait que les veganes trans, intersexuées, et gender-queers font face à un nombre supplémentaire de défis dans le mouvement.

This piece was originally submitted to an advocacy anthology designed to introduce new vegans to the movement, but did not make the final cut. For more information on sexism in the Nonhuman Animal rights movement, please stay tuned for my forthcoming release, A Rational Approach to Animal Rights: Extensions in Abolitionist Theory to be published by Palgrave Macmillan later this year. Please also see my publication with the Journal of Gender Studies, “The Role of Professionalization Regarding Female Exploitation in the Nonhuman Animal Rights Movement and my essay for The Feminist Wire, “Gender Policing the Vegan Woman.”


Corey Lee WrennDr. Wrenn is Lecturer of Sociology. She received her Ph.D. in Sociology with Colorado State University in 2016. She received her M.S. in Sociology in 2008 and her B.A. in Political Science in 2005, both from Virginia Tech. She was awarded Exemplary Diversity Scholar, 2016 by the University of Michigan’s National Center for Institutional Diversity. She served as council member with the American Sociological Association’s Animals & Society section (2013-2016) and was elected Chair in 2018. She serves as Book Review Editor to Society & Animals and has contributed to the Human-Animal Studies Images and Cinema blogs for the Animals and Society Institute. She has been published in several peer-reviewed academic journals including the Journal of Gender Studies, Feminist Media Studies, Disability & Society, Food, Culture & Society, and Society & Animals. In July 2013, she founded the Vegan Feminist Network, an academic-activist project engaging intersectional social justice praxis. She is the author of A Rational Approach to Animal Rights: Extensions in Abolitionist Theory (Palgrave MacMillan 2016).

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