Des Hommes Rongeant des Steaks

Translation by Hypathie: Feminist and Anti-Speciesist Blog. The original English version of this essay can be found by clicking here.
Man in a suit sits in front of a plate with a raw steak, knife and fork poised in his fists on the table

A la suite de mon essai “Des femmes riant seules avec des salades “, un collègue curieux google-ise ce qu’on pourrait considérer comme le contraire : des hommes mangeant des steaks. Ce qu’il a trouvé, et qui s’est trouvé confirmé lors de mes propres recherches d’images sur Google, est le thème répétitif  d’hommes s’agaçant les dents sur une grosse tranche de viande, souvent avec la fourchette et le couteau fermement plantés de chaque côté de leur assiette.

Man gnawing on raw steak

Le message primordial envoyé par ces images semble être ” JE SUIS UN HOMME ; L’HOMME A BESOIN DE VIANDE “. Ses poings bien alignés et leur prise ferme sur les ustensiles sont des codes genrés communs, présentant les hommes aux commandes et au contrôle de leur environnement.

De façon intéressante, les steaks sont presque toujours montrés crus. L’intention vraisemblable est de montrer la consommation de chair crue par les hommes (un comportement anti-naturel) comme naturelle. Le fait est souligné par l’abondance de photographies qui montrent des hommes consommant le steak directement sans l’aide de couverts, rongeant la chair comme s’ils étaient une espèce carnivore non humaine. A contrario, quand je cherche des images de femmes mangeant des steaks, à maintes reprises, elles sont aux prises avec de la viande crue positionnée au-dessus de leur tête, l’air accablé -personne ne mange la tête à la renverse. Ceci suggère aussi la soumission, une soumission souvent sexualisée à travers leur pose et leur nudité. Quand elles ont des couverts, elles sont davantage montrées les utilisant de manière faible ou peu sûre.

Woman Eating Steak

Par dessus tout, les images de femmes mangeant des steaks sont moins nombreuses, car la notion est contraire aux normes de genre. Quand on en trouve, il est clair que la hiérarchie des genres doit être préservée en démontrant que la consommation de chair (un acte de domination et de pouvoir) est moins naturelle et plus maladroite chez les femmes.

Women Cutting Steak

La viande est un symbole de masculinité. Donc, les hommes interagissent avec la viande pour démontrer leurs prouesses, les femmes interagissent avec la viande pour démontrer leur soumission.


Corey Lee WrennDr. Wrenn is Lecturer of Sociology. She received her Ph.D. in Sociology with Colorado State University in 2016. She received her M.S. in Sociology in 2008 and her B.A. in Political Science in 2005, both from Virginia Tech. She was awarded Exemplary Diversity Scholar, 2016 by the University of Michigan’s National Center for Institutional Diversity. She served as council member with the American Sociological Association’s Animals & Society section (2013-2016) and was elected Chair in 2018. She serves as Book Review Editor to Society & Animals and has contributed to the Human-Animal Studies Images and Cinema blogs for the Animals and Society Institute. She has been published in several peer-reviewed academic journals including the Journal of Gender Studies, Feminist Media Studies, Disability & Society, Food, Culture & Society, and Society & Animals. In July 2013, she founded the Vegan Feminist Network, an academic-activist project engaging intersectional social justice praxis. She is the author of A Rational Approach to Animal Rights: Extensions in Abolitionist Theory (Palgrave MacMillan 2016).

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Des Femmes Riant Seules Avec des Salades

Translation by Hypathia: Feminist and Anti-Speciesist Blog. The original English version of this essay can be found by clicking here.

Woman eating outdoors

Vous les avez vues des centaines de fois. Vous savez, la dame croquant dans une salade, les yeux brillants. Tête rejetée en arrière avec une jubilation hystérique, elle est surprise par le glorieux mélange de végétaux qui agrémentent son assiette. Le tract promotionnel de votre coopérative locale d’alimentation naturelle en est orné. Le site web de votre chaîne d’épicerie les utilise. Ainsi que les affiches sur les murs de la salle d’attente de votre médecin. Des tonnes d’organisations véganes les utilisent. Zut, je parie que si je vérifie bien, j’en ai probablement montré une pour illustrer un des billets de ce blog au moins une fois.

Des stocks de femmes… assises seules… avec une salade tellement hilarante, qu’elles ne peuvent s’empêcher d’exploser de rire et de délice.

L’absurdité de ces images a attiré l’attention d’Internet, avec pour résultat des imitations: une page Tumblr, et même une pièce de théâtre.

Manger une salade n’est pas particulièrement drôle. Ça induit rarement l’extase. Habituellement, c’est plutôt une expérience difficile consistant à introduire maladroitement des feuilles de laitue ans votre bouche. C’est souvent insatisfaisant : trop ou pas assez d’assaisonnement. En réalité, vous craignez qu’un bout de laitue reste coincé entre vos dents, et ça vous empêche de sourire d’une oreille à l’autre entre chaque bouchée. En général, manger de la salade est une activité ennuyeuse et ordinaire.

Quand votre salade n’arrête pas de faire des plaisanteries:

Collection of stock photos showing women laughing while they eat a salad

Mais manger de la salade est une activité de femme, et comme telle, elle doit être accomplie de façon à raconter une histoire particulière qui a une fonction quand on l’observe et la documente.

La théorie féministe végane nous dit que la nourriture -ce que nous mangeons et comment nous le mangeons- est fermement enracinée dans des normes de genre. La consommation de légumes (avec la salade comme omniprésent cliché) est un comportement hautement féminisé. Les codes publicitaires genrés montrent aussi de façon régulière une hyper émotivité chez les femmes. D’où découle qu’elles y sont portraiturées avec des réponses émotionnelles extrêmes et inappropriées. Ces représentations ajoutent l’émotivité, l’infantilité et l’immaturité, à l’habituelle compréhension culturelle de la féminité. Ces images renforcent le statut de subordination des femmes. Apparier des femmes hyper-émotives avec des nourritures hyper-féminisées compose une parfaite iconographie sexiste.

Man about to eat a forkfull of salad, smiles softly to camera

Bien sûr, on m’a opposé l’inévitable argument “les hommes aussi”. Vrai, on nous montre des hommes s’excitant légèrement avec des salades, mais soyons honnêtes, ils sont moins fréquemment dépeints riant la tête rejetée en arrière, en sous-vêtements ou enceint.es ! La frivolité genrée de la consommation de salades est terriblement une affaire de femmes.

Woman laying on bed in white underwear eating a salad

Quand on nous montrera des hommes -scénario improbable- mangeant une salade, prostrés dans un lit, en string blanc, alors, OK, on en reparle.

 


Corey Lee WrennDr. Wrenn is Lecturer of Sociology. She received her Ph.D. in Sociology with Colorado State University in 2016. She received her M.S. in Sociology in 2008 and her B.A. in Political Science in 2005, both from Virginia Tech. She was awarded Exemplary Diversity Scholar, 2016 by the University of Michigan’s National Center for Institutional Diversity. She served as council member with the American Sociological Association’s Animals & Society section (2013-2016) and was elected Chair in 2018. She serves as Book Review Editor to Society & Animals and has contributed to the Human-Animal Studies Images and Cinema blogs for the Animals and Society Institute. She has been published in several peer-reviewed academic journals including the Journal of Gender Studies, Feminist Media Studies, Disability & Society, Food, Culture & Society, and Society & Animals. In July 2013, she founded the Vegan Feminist Network, an academic-activist project engaging intersectional social justice praxis. She is the author of A Rational Approach to Animal Rights: Extensions in Abolitionist Theory (Palgrave MacMillan 2016).

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